Revue DANSER / 2002

KINGS

Sérieusement impertinent

Artiste atypique, un brin provocateur, un brin iconoclaste, Michel Schweizer, rôdé à la performance, a inventé un spectacle inclassable programmé aux îles de danses 2002. Inclassable et généreux, qui tord le cou aux idées reçues.
(…)
L’idée de «Kings» part de la rencontre avec un jeune garçon, si enthousiasmé par le boxeur Mike Tyson que Canal+ l’emmènera en Angleterre interviewer son idole. « Je lui ai proposé de raconter ce souvenir sur scène. J’ai commencé par un travail relationnel, introspectif et respectueux, bâti sur l’idée qu’il était utile aujourd’hui de plonger les gens dans un vis-à-vis sans ombre sur scène.» Viendront se juxtaposer un ex-danseur de Régine Chopinot, un autre de hip hop, une danseuse de claquettes, un maître- chien … Tranches de vie de « rois » d’un soir, «Kings» détourne le principe du reality show en le faisant entrer dans le système de la représentation. Le projet est sélectionné sur dossier pour Bagnolet. Michel prépare alors une demi-heure et se retrouve- «étrange souvenir !» glisse-t- il- au gymnase Maurice-Bacquet avec un nouvel Ovni- objet volontairement non identifiable qui reçoit des encouragements et gagne des coproducteurs. Le contenu est une exposition de matériaux autobiographiques, mais « Kings» es t très écrit, négocié avec les personnes et construit pour provoquer un maximum de plaisir. Le mixage de réalité, à des degrés divers, et de représentation est troublant, y compris pour les protagonistes dans l’exercice d’interprètes.» Bref, un objet culturel qui, à ce titre, a une valeur marchande.
Eveiller un autre regard
Michel embauche donc un maître-chien pour le surveiller, « selon une partition très simple, une déambulation précise, jusqu’à faire mordre un coin du tapis de danse, au grand scandale de certains spectateurs. Habilement dosé sur le temps et dans l’espace, c’est un élément de perturbation qui dynamise la tension.»
Notre iconoclaste a derrière la tête de se jouer « des enjeux relationnels qu’entretiennent l’art, le politique et l’économie.» Il espère, en désarçonnant un peu le spectateur, éveiller un autre regard, débarrassé de ses a priori sur un boxeur.

Bernadette Bonis